Le méthane est un gaz à effet de serre bien connu. Sa concentration dans l’atmosphère a été multipliée par trois durant l’anthropocène, ce qui explique l'attention particulière qui lui est dédiée. Actuellement, la réduction des émissions gaz à effet de serre par l’activité humaine est une priorité absolue pour maintenir le réchauffement climatique largement sous le seuil des 2°C supplémentaires.

En 2020, la concentration de méthane dans l’atmosphère a augmenté de 15,1 parties par milliard (ppb). Il s’agit de la hausse la plus importante depuis le début des mesures atmosphériques, dans les années 1980. Cette augmentation tout aussi spectaculaire qu'inquiétante est expliquée dans la nouvelle étude publiée dans Nature, dirigée par le professeur Shushi Peng de l’université de Pékin en Chine. Avec une équipe de scientifiques du CEA, de l’UVSQ et du CNRS travaillant au Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement (LSCE) en France et des coauteurs américains et norvégiens, un travail a été réalisé à partir des inventaires afin d’évaluer les émissions de méthane provenant des combustibles fossiles et de l’agriculture, et avec des modèles d’écosystèmes pour prédire les émissions liées aux zones humides et aux incendies. Ces résultats sont complétés par la modélisation inverse des émissions régionales à partir des mesures de concentrations atmosphériques.

Philippe Ciais, chercheur au CEA qui a codirigé l’étude au LSCE, explique la méthode de recherche pratiquée : « Deux facteurs expliquent la forte augmentation du méthane atmosphérique en 2020. Nous avons combiné différentes méthodes pour comprendre ce phénomène, qui constitue une expérience en grandeur nature et qui apporte un nouvel éclairage sur le bilan mondial du méthane ».

Tout d’abord, la présence des radicaux hydroxyles (OH), principaux responsables de l’élimination du méthane dans l’atmosphère, a diminué en 2020. Davantage de méthane est donc resté dans l’atmosphère. La diminution des OH s’explique principalement par une baisse des émissions d’oxyde d’azote (NOx) induite par la réduction temporaire des émissions dans les régions polluées, pendant les confinements de la pandémie de COVID-19. C’est donc l’une des principales raisons expliquant l’augmentation anormalement élevée de la concentration de méthane dans l’atmosphère et y contribuant pour moitié environ. En 2020, les chercheurs ont également trouvé une augmentation des émissions naturelles de méthane par les zones humides. Celle-ci s’explique par les conditions plus humides et plus chaudes observées dans les hautes latitudes nord et dans les Tropiques de l’hémisphère Nord. Cet effet explique la seconde moitié de l’augmentation du méthane.

« Ce sont potentiellement deux mauvaises nouvelles pour le changement climatique... », déclare Marielle Saunois, experte du cycle du méthane au LSCE.

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